L’identité juive d’Alep : entre tradition et modernité
La ville d’Alep présente des caractéristiques particulières qui ont marqué le développement sociologique des Juifs d’Alep. C’est la deuxième plus grande ville de Syrie, mais tout au long de l’histoire, elle a été un centre commercial, culturel et ethnique majeur. Elle a créé une mosaïque d’opinions et de positions qui a engendré une atmosphère d’ouverture et de tolérance. La ville abrite diverses communautés ethniques : des chrétiens orthodoxes, des Grecs, des catholiques, des protestants, des musulmans, des Juifs, des Arméniens, des Circassiens, des Assyriens, des Turcs, des habitants des montagnes de Qamishli, et bien d’autres.
Cette diversité, cette ouverture et cette tolérance ont forgé des Juifs d’une grande richesse culturelle. Les Juifs eux-mêmes étaient constitués de Moust’arabim, de Franco-Juifs, de Juifs de Livourne, de Juifs d’Irak, ainsi que de Juifs ashkénazes, comme les familles Hornstein, Goldman et Lerner. Ce qui est intéressant, c’est que tous se sont intégrés dans un creuset unique, une mosaïque de toutes ces communautés. Ce creuset était celui des Juifs d’Alep.
D’autre part, la tolérance a entraîné une intégration particulière au sein du judaïsme d’Alep : la Torah et la Halakha d’une part, et la vie mondaine de l’autre, les deux éléments allant de pair sans aucun conflit. À tel point que les habitants d’Alep disaient toujours qu’il fallait vivre selon le principe (Sa’ah le-kh wa sa’ah le-rabaka), c’est-à-dire “une heure pour toi et une heure pour ton Seigneur.”
Le mélange cosmopolite a laissé sa marque sur les Juifs, qui sont devenus eux-mêmes des hommes du monde, avec des réussites prouvées dans les domaines du commerce, des professions libérales et de la banque. Le sentiment profond d’attachement au judaïsme reste présent aujourd’hui chez les Juifs d’Alep, qui figurent toujours en tête de liste des donateurs pour toutes les causes juives et, par conséquent, pour toutes les causes sionistes.
Moshe Cohen